Repenser son organisation®

Fiche N°9

L’orientation de l’action (1ère partie)

L’orientation de l’action au sein de l’organisation est le troisième des cinq paramètres de conception (fiche N°4). Il regroupe les deux forces en tension suivantes : orientation de l’action verticale et orientation de l’action horizontale.

Les organisations verticales

Sur le paramètre de conception « Orientation de l’action », une organisation peut prendre quatre formes très différentes : verticale, plutôt verticale, plutôt horizontale ou horizontale.

Quand le besoin de coordination entre les entités est très faible voire inexistant, l’orientation de l’action est verticale. La profondeur de l’organisation (le nombre de niveaux hiérarchiques) est importante, sa largeur réduite au maximum. L’ensemble des activités et des étapes des processus de décisions sont logées dans les « silos » verticaux, les seuls aspects horizontaux formalisés étant constitués de procédures, de réunions et d’éventuelles instances permettant d’échanger des informations, des savoirs et/ou des pratiques.

L’orientation de l’action est plutôt verticale quand l’essentiel des activités et des étapes des processus de décisions sont logées dans les « silos » verticaux mais certains rôles et/ou fonctions transverses bénéficient d’une capacité d’animation permettant de coordonner horizontalement certains sujets critiques.

Ces rôles transverses sont en général tenus par des opérationnels. A temps partiels, ils s’ajoutent à leurs missions habituelles et permettent d’assurer la liaison entre leur entité d’appartenance et une ou plusieurs autres entités. Par exemple, un centre hospitalier décide de mettre en place des correspondants qualité. Leur rôle est défini de la manière suivante : « Véritable relais de la cellule qualité, au sein de son service et au-delà de son activité principale, le correspondant qualité se doit de dynamiser la démarche qualité. Cette mission, qui nécessite de bien connaître les principes qualité, devra s’exercer en étroite collaboration avec l’encadrement qui reste responsable de la qualité dans le service… L’objectif principal est de créer une dynamique qualité au sein des services et de faire vivre la démarche au plus près des acteurs de l’hôpital. Le correspondant qualité doit permettre d’assurer le relais de l’information entre le service et la cellule qualité et aussi entre la cellule qualité et le service… Ses principales missions sont : aider à la diffusion et à la transmission des informations ; participer à la gestion documentaire ; assurer un rôle sentinelle ; participer à des actions ponctuelles ; aider à la présentation du dispositif qualité aux nouveaux personnels. »

Les fonctions transverses sont, elles, exercées à plein temps. Les responsables grands comptes en sont de bons exemples. Une entreprise industrielle commercialise trois types de produits : A, B et C. Longtemps, les clients de chacun de ces produits sont différents. L’entreprise a ainsi spécialisé ses vendeurs par type de produits. Mais depuis quelques années, elle cherche à vendre davantage « des systèmes que des produits à part entière ». Cette politique commerciale est couronnée de succès, notamment auprès de certains grands comptes. L’entreprise se heurte alors à un problème lié à son organisation : plusieurs vendeurs mènent auprès des mêmes clients des démarches commerciales parallèles sans aucune concertation. Certains clients commencent à sévèrement gronder. L’entreprise décide alors, pour chacun des grands comptes, de nommer des responsables en charge de la coordination commerciale. Ils jouent un rôle d’interface avec les grands comptes et sont responsables de l’élaboration des offres multiproduits.

L’organisation matricielle

On commence à parler d’organisation horizontale plutôt que d’organisation verticale dès lors que, au-delà des « silos » verticaux au sein desquels reste logée l’autorité hiérarchique, certaines entités horizontales bénéficient d’une autorité fonctionnelle, ce qui rend le fonctionnement matriciel.

Le découplage des autorités hiérarchique et fonctionnelle place la coopération au cœur de la matrice. L’autorité est partagée entre ceux en charge d’obtenir des résultats liés à l’activité de l’entreprise et ceux qui veillent à la gestion de ses ressources (financières, technologiques, matérielles et humaines). L’efficience, c’est-à-dire la manière dont les ressources sont utilisées, est un enjeu stratégique aussi important que l’efficacité. La production de la performance nécessite une collaboration entre deux catégories de protagonistes qui détiennent chacun une partie de l’autorité. Les premiers ne peuvent pas être performants sans les seconds, et réciproquement.

Chaque versant de la matrice porte une logique organisationnelle différente répondant à un objectif stratégique spécifique. A l’intersection des lignes et des colonnes se trouvent les « nœuds » de la matrice, c’est-à-dire les entités charnières qui rapportent à la fois à une entité verticale et horizontale de rang supérieur. Le fonctionnement matriciel remet en cause le principe de l’unicité de commandement. Les « nœuds » de la matrice n’ont plus un seul « chef » mais au moins deux.

L’organisation reconfigurable

Une organisation est complétement horizontale quand l’essentiel des activités et des étapes des processus de décisions est logé dans des entités horizontales. Ces dernières, souvent multidimensionnelles (par produits, marchés et/ou régions géographiques), permettent de poursuivre plusieurs objectifs stratégiques simultanément. Les entités verticales, elles, ne sont là que pour fournir des compétences et des prestations de services. La profondeur de l’organisation est réduite à sa plus simple expression alors que sa largeur est portée à son maximum. L’organisation reconfigurable en est un bon exemple.

La colonne vertébrale de l’organisation de ce cabinet de conseil français est constituée de quatre centres d’expertise : stratégie, organisation, gestion des ressources humaines et système d’information. Chacun d’eux est placé sous l’autorité d’un associé spécialiste du domaine. Le rôle de ce dernier est de développer et faire évoluer les expertises associées à son centre, de mettre au point des méthodologies et de faire monter en compétences les consultants. La vocation des centres d’expertise est d’alimenter en compétences les dimensions horizontales de l’organisation qui réalisent l’ensemble des activités opérationnelles du cabinet. On peut regrouper ces dernières en deux catégories.

En premier lieu, les activités de production. A chaque fois que le cabinet gagne un contrat, il constitue une équipe projet. Le plus souvent, celle-ci se compose de consultants appartenant à des centres d’expertise différents. Le directeur de projet est responsable de la satisfaction du client et de la rentabilité du contrat. A ce titre, il exerce une autorité au quotidien sur les membres de son équipe projet et participe à leur évaluation annuelle. L’entretien annuel des consultants est, lui, conduit par les directeurs des centres d’expertise qui s’appuient sur les évaluations réalisées par les directeurs de projet tout au long de l’année.

La seconde catégorie d’activités transversales concerne le marketing et le développement des ventes. Le cabinet est positionné sur quatre marchés très différents : les entreprises industrielles, les banques et les assurances, les entreprises publiques et les établissements de santé. Chacun d’eux est placé sous la responsabilité d’un directeur de marché. Son rôle consiste à veiller son marché de manière à bien repérer les besoins de ses acteurs, élaborer des offres permettant d’y répondre, prospecter, répondre aux appels d’offre et suivre la satisfaction des comptes rattachés à son marché.

Dans l’exemple de ce cabinet conseil, à l’exception des activités de R&D (développer une expertise et des méthodologies) et de développement des compétences qui constituent l’ossature verticale de l’organisation, toutes les autres activités (la production, le marketing et le développement des ventes) sont transverses. L’organisation est dite reconfigurable pour deux raisons. D’abord parce que les dimensions transversales de l’organisation varient au gré de l’évolution des enjeux stratégiques du cabinet. Cela va sans dire pour les projets mais s’avère également être le cas du marketing et du développement des ventes. Par exemple, au regard de l’évolution de son activité, lors du prochain exercice, le cabinet va nommer un nouveau directeur de marché en charge des PME et des ETI. La seconde raison tient à la substitution de la notion de fonction par celle de rôle. Dans une organisation « classique », sauf exception, chaque personne exerce une fonction et une seule. Dans l’organisation reconfigurable, la plupart des personnes tiennent plusieurs rôles. Dans ce cabinet conseil, une même personne peut très bien être à la fois directeur d’un centre d’expertise, directeur d’un ou plusieurs projets et directeur de marché. C’est le cas d’ailleurs de la plupart des associés.